Resté à l’écart du développement économique lancé depuis plus d’un siècle dans les pays du Nord, le monde tropical ne s’est vraiment éveillé qu’après la Seconde Guerre mondiale : accès de nombreux pays à l’indépendance, doublement de la population en trente ans, croissance de la production agricole et des échanges commerciaux. Dans cette fièvre de développement, seuls quelques spécialistes, forestiers et botanistes, s’inquiétèrent de la réduction de plus en plus rapide des surfaces forestières tropicales.
La première prise de conscience officielle de l’ampleur
du phénomène eut lieu après la Conférence
internationale sur l’environnement, en 1972, à Stockholm.
L’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et
l’alimentation fut alors chargée d’estimer la situation
et l’évolution des forêts tropicales.
Le verdict tomba en 1981 : sur 1 900 millions d’hectares de forêts
tropicales, 11,5 millions disparaissaient chaque année. Les
forêts denses humides perdaient, à elles seules, 7,5 millions
d’hectares par an, et les forêts des zones tropicales sèches
4 millions d’hectares. A ce rythme il n’y aurait plus de
forêts dans cent cinquante ans !
Tout au long de la décennie 1980-1990, les médias ont
repris ces résultats : aujourd’hui l’opinion est
alertée, les associations et les hommes politiques mobilisés.
L’avenir des forêts tropicales est devenu un enjeu planétaire
dont se saisissent le sommet des sept pays les plus riches du monde
et l’Assemblée générale des Nations unies.
Tour à tour sont accusés les paysans brésiliens
en Amazonie, les agriculteurs javanais à Sumatra et à Bornéo,
les exploitants forestiers au Gabon, au Sarawak ( nord de Bornéo)
ou aux Philippines, les multinationales en Amazonie et au Zaïre,
ou encore les banques internationales soupçonnées de
n’aider que des projets de développement rentables à court
terme et nécessitant la destruction des forêts.
L’inquiétude est d’autant plus grande que la déforestation
tropicale s’est encore accélérée au cours
de la décennie 1980-1990. Ce sont 17 millions d’hectares
de forêts qui ont disparu chaque année ; plus de trois
fois la surface de la Suisse. Un chiffre 50 % supérieur à celui
de la décennie précédente. A ce rythme, il n’y
aura plus de forêts tropicales dans un siècle !
La première raison de la déforestation des zones tropicales
résulte de l’extension des territoires agricoles. L’Amazonie
est envahie par des colons venus des plateaux andins, du nord-est et
du sud brésilien. En Indonésie, Sumatra et le Kalimantan
sont colonisés par des Javanais. Les premiers habitants de la
forêt, Indiens d’Amazonie Pygmées d’Afrique
ou Dayaks de Bornéo sont chassés de leurs territoires,
parfois par la violence et, lorsqu’ils sont « intégrés »,
c’est souvent au détriment de leur survie future.
La déforestation tient aussi à l’attrait économique à court
terme des terres forestières. On y exploite des mines, des ressources
hydrauliques et du bois. Mais les sols sont surtout convoités
pour y implanter, après défrichage, des cultures ( café,
cacao, ananas, palmier à huile) ou des élevages bovins.
De nombreux pays en développement, pressés par le besoin
de devises, permettent que leurs forêts soient dévastées.
Ainsi l’élevage à grande échelle est responsable
de la disparition de millions d’hectares de forêt. En Amérique
centrale, le quart des forêts a été détruit
en vingt ans pour produire de la viande bovine, destinée à l’exportation.
Mais les rendements sont très bas et la productivité décline
très vite. La terre épuisée, faute d’y apporter
des engrais, oblige alors à défricher de nouvelles zones…
L’ étude de la déforestation en Amazonie a été effectuée en comparant, entre 1978 et 1989, les images satellites fournies par le satellite américain Landsat. Sur un total de près de quatre millions de kilomètres carrés de forêt, le taux moyen de déforestation a été estimé à 27 000 kilomètres carrés par an (soit 0,7 % de la surface). On estime, en outre, que le maximum a été atteint en 1987 et qu’actuellement le taux annuel de déforestation a tendance à diminuer.
Les effets sont multiples :Avec plus de 170 millions d’hectares, le Zaïre détient plus de la moitié de la forêt du continent africain. Chaque année, 535 000 hectares disparaissent principalement pour le défrichement agricole (350 000 hectares), puis pour la récolte de bois de feu (180 000 hectares) et enfin, par une exploitation abusive de bois pour l’industrie (6000 hectares).